Deux mois après sa mise en service pour exploitation commerciale, officiellement le 15 mai dernier, le Bus rapid transit (BRT) continue de gagner la confiance des usagers. Toutefois, cet ancrage ne fait pas que des heureux notamment dans le milieu du transport public de voyageurs.
Le Bus rapid transit (BRT), mis en service le 15 mai 2024, est très prisé par les usagers des transports de masse de la banlieue dakaroise. Ce nouveau système de transport est devenu un véritable concurrent pour des taxis jaunes-noirs et des taxis clandestins appelés «clandos» mais aussi des propriétaires des véhicules particuliers qui font du transport public notamment aux heures de pointe, en allant au travail au centre-ville ou à la descente.
Le prix du transport du BRT, pourtant jugé très cher par des populations au départ, est aujourd’hui considéré très abordable par nombre d’usagers. Si on le compare à celui qu’appliquent les taxis et «Jakartamen». Une accessibilité en termes de coût, 400 FCFA la section et 500 FCFA de la Préfecture de Guédiawaye à Pétersen, en plus du gain de temps, qui explique que de plus en plus de personnes ont recours à ce moyen de transport de masse pour leurs déplacements surtout en direction des zones qu’il désert.
Le Bus rapid transit s’est accaparé une bonne partie de la clientèle des taxis qui habite dans la banlieue de la capitale, Dakar, sur l’axe de son tracé de Guédiawaye à Pétersen, constatent plusieurs clients des transports publics. Conséquence, la voie qu’emprunte le Bus rapid transit n’attire plus certains chauffeurs des jaunes-noirs. Car la clientèle s’y fait rare.
Abdoulaye, ancien employé d’une banque de la place, résidant à Keur Massar, est de ceux-là. «Je roule rarement sur les artères où passe le BRT. Ils (les clients) préfèrent les bus modernes dont les tarifs coutent moins chers et tout le confort qui sied. Le prix d’un voyage en taxi, des Parcelles Assainies au Centre-Ville, vous permet de payer deux voyages avec le Bus rapid transit».
DES TAXIMEN POUR UNE COMPENSATION, LEURS PREOCCUPATIONS N’AYANT PAS ETE PRISES EN COMPTE PAR L’ETUDE D’IMPACT
Un autre taximan enfonce le clou. Selon lui, au-delà du manque à gagner, «l’activité de transport n’est pas rentable. L’état des routes ne nous permet pas réaliser des gains importants. Les pannes récurrentes des véhicules constituent un véritable problème. Pis, l’installation de l’hivernage n’arrange pas les choses. Nous nous rendons chez les mécaniciens fréquemment pour dépanner nos véhicules. En plus, les pluies qui tombent rendent certains endroits de la ville inaccessibles», a-t-il révélé.
Toutefois, malgré l’impact de la percée du BRT sur leur activité, pardon gagne-pain, certains taximen ne perdent pas espoir. Ismaïla Yade, taximan, déclare : «les taximen ont leur clientèle propre. Il y a des gens qui, pour rien au monde, ne vont renoncer à prendre les taxis. Ils sont à l’aise quand ils prennent un taxi. Certains trouvent que nos prix sont élevés. Mais ils ignorent le prix du gasoil. Sans compter le versement journalier de 10.000 FCFA que nous assurons».
A en croire notre interlocuteur, la vraie menace, c’est la concurrence interne dans ce sous-secteur des taxis urbains. «Non, le problème est ailleurs. Le concurrent qui nous crée des ennuis, c’est une entreprise de la place qui opère dans la filière. Elle a mis en place un dispositif avec une plateforme de communication et un tarif qui défient toute concurrence», a déploré M. Yade.
Néanmoins, les taximen réclament des autorités des compensations pour les préjudices subis, parce n’ayant pas été pris en compte par l’étude d’impact du BRT. «Nous réclamons une compensation. Avec la mise en service du BRT, nous avons été lésés car les études menées en amont n’ont pas intégré nos préoccupations et intérêts», défendent-ils.
En outre, en cette période d’hivernage qui s’installe dans la capitale, contraints parfois de garer leurs véhicules quand de fortes pluies sont enregistrées à Dakar et sa banlieue, les taximen sollicitent une aide des nouvelles autorités : la baisse du prix du carburant.
QUAND DES PARTICULIERS CHOISISSENT DE GARER LEURS VOITURES POUR PRENDRE LE BRT, EN ALLANT AU TRAVAIL
L’impact du BRT a pris de l’ampleur dans le transport urbain. De Guédiawaye au terminus de Pétersen, en passant par les Parcelles Assainies, Grand-Yoff, Sacré-Cœur, les nouveaux bus se relayent dans les stations sans répit. Un bus toutes les 6 minutes, avaient déclaré les autorités lors de la mise en service officielle. Les rotations sont régulières. En plus, la fluidité du trafic et le confort qu’offre le BRT sont à l’origine du succès de ce sous-secteur des transports publics.
A la station de Grand-Médine, toutes les 6 minutes, il y a un départ, direction le Centre-Ville de Dakar. Les craintes de nombreux usagers se sont dissipées. Elles sont relatives aux retards et le déficit du parc automobile. Ainsi, en plus des usagers traditionnels des transports en commun, des gens pourtant «à l’abri du besoin», parce que déjà propriétaires de véhicules, choisissent désormais de garer leurs propres moyens de locomotion pour prendre le BRT. Histoire de faire des économies sur le coût du carburant jugé trop cher.
Ce que confirme un employé d’une entreprise qui a indiqué : «j’ai garé ma voiture. Au lieu de dépenser 2000 FCFA pour l’achat du carburant, je préfère prendre le Bus rapid transit pour aller au travail. Je gagne en temps et ça me permet de faire des économies».
En dehors de la clientèle des taxis et autres moyens de transport qui s’effritent, le BRT, roulant sur des voix dédiées, est également source de désagréments. Sur de nombreuses artères, notamment au niveau des intersections comme sur l’avenue Bourguiba, des embouteillages sont vécus en longueur de journée. Ils se sont mêmes intensifiés. Tous les jours on constate une longue procession de véhicules dans les deux sens, de part et d’autre du tracé du BRT dont le passage des bus nécessite l’arrêt de tous les autres véhicules et moyens de transport et de locomotion. Ce qui ralenti considérablement la mobilité sur cette voie très fréquentée par les automobilistes.