Les 3 pays de l’AES sont dirigés par des hommes qui ont accédé au pouvoir par un coup d’État. Je suis heureux de cela et pense que notre sort en Afrique de l’Ouest se dessine et se décide dans ces trois pays.
TRIBUNE – Toutefois, il faut reconnaître ceci : un coup d’État, c’est le quitte ou double. Vous jouez votre tête. Ou vous réussissez, ou vous perdez…tout. Si vous échouez, vous perdez la vie. Si vous réussissez votre coup, vous gagnez le « droit » en quelque sorte de recommencer le monde – comme J. J Rawlings hier, vous annulez tout ce qui précède et qui a été dévoyé par la corruption humaine. Vous réécrivez les règles du jeu, vous décidez du nouveau calendrier politique. Le pouvoir que vous avez est à la hauteur des risques que vous avez pris et que vous continuez de prendre à chaque instant. Oui, sans cesse, vous remettez votre vie en jeu – c’est pourquoi Assimi Goita, Tiani et I. Traoré ne sortent pas de leur pays, se gardent des poignées de main, etc.
Au Sénégal, Diomaye Faye et O. Sonko ont accédé au pouvoir par des élections démocratiques indiscutables. La Loi. Ils ont gagné le pouvoir de gouverner mais pas le « droit » de recommencer le monde. Si j’ose dire, les 45% qui n’ont pas voté pour eux existent. La Constitution et le calendrier politique sont fixés indépendamment d’eux. Dans quelques mois, ils doivent retourner devant les électeurs pour des législatives. Ils espèrent acquérir une majorité de députés, et ce n’est qu’ainsi qu’ils pourront, j’imagine, modifier certains aspects de la Constitution.
Hier, Diomaye Faye et Sonko étaient des opposants. Aujourd’hui, ils gouvernent. Les gouvernants d’hier et les rivaux deviennent leurs opposants. Il y a des rancœurs pour des postes et des rôles dans l’État que l’on doit céder à d’autres. Il y a des craintes de devoir rendre compte pour des malversations et autres actes délictueux, etc. L’adversité est forte et sérieuse. A l’intérieur et à l’extérieur du pays. Il y a des complicités de toutes sortes de tous les côtés, des ruses, des manigances. L’État du Sénégal est encore dans le franc CFA qu’on le veuille ou non. Il y a des garde-chiourmes sénégalais et africains de cette affaire. Ils sont zélés. Et expérimentés. C’est le réel. Les voyages du président sénégalais et ses propos à ces occasions ne doivent donc pas être interprétés outre mesure, à mon avis. Il sait bien que Ouattarra a soutenu fortement son adversaire lors de l’élection présidentielle ; lui dire « cher aîné » et louer sa « sagesse » ainsi de suite, c’est de l’antiphrase. Ou être sarcastique avec déférence. La franchise, la sincérité est un honneur que l’on mérite.
Ce qu’il importe dans l’immédiat pour le duo Diomaye Faye et Sonko, c’est d’agir très en faveur des conditions concrètes de vie des Sénégalais. Pas de prêter attention à la jactance des « influenceurs panafricains » qui sont certes utiles, mais qui ont aussi la fâcheuse tendance de se prendre trop au sérieux. Les principaux d’entre eux se sont gardés de tout focus véritable sur l’incroyable actualité « politique » au Togo sans doute pour des raisons inavouables. Il y en a un qui veut même devenir président dans son pays juste à côté. Eux aussi font donc des calculs, c’est-à-dire ce qu’ils refusent aux hommes et femmes de qualité qui gouvernent désormais le Sénégal.
Théo Ananissoh
Maderpost