Alliance contre nature par ci. Combines et combinaisons par là. Sans occulter des philanthropies circonspectes. A un plus de dix mois de l’Assemblée générale élective de la Fédération sénégalaise de football, les ambitions se télescopent aiguisant davantage les appétits des rentiers du football. L’affaire de la licence de Ababacar Sarr pourrait être juste une partie de l’iceberg.
FOOOTBALL – Le 26 avril 2021, dans un éditorial, nous avions appelé à un consensus fort pour sauver le football sénégalais des démons de la division. Dieu merci, nous avions été entendus par l’écrasante majorité des acteurs dont un d’entre eux, Louis Lamotte, qui a pu sortir de son esprit fertile l’extraordinaire slogan «Manko Wutti Ndamli» (ensemble pour la victoire finale).
Au soir du 6 février 2022, dans un stade Olembe rempli comme un œuf, Sadio Mané, d’une frappe venue d’ailleurs, permettra au Sénégal de mettre fin à 57 ans d’attente, de disette, de symphonies inachevées. Les villes, les villages, les hameaux du Sénégal étaient tous, sens dessus dessous.
On s’est embrassés, on a dansé, on a fêté nos héros. La joie était indescriptible. Le peuple était en transe. On courrait à tue-tête sans destination, sinon celle de suivre la meute en extase.
Tout le monde était ivre de joie. Notre pays venait d’entrer dans la cour des grands. Nous étions devenus la 15ème nation africaine à inscrire son nom sur le marbre du palmarès des vainqueurs de la plus prestigieuse coupe d’Afrique des nations à côté de l’Égypte, du Cameroun, du Ghana, du Nigeria, de la Côte d’Ivoire, de la Rd Congo, de l’Algérie, du Congo, du Soudan, de l’Ethiopie, du Maroc, de la Tunisie, de l’Afrique du Sud et de la Zambie sur les 54 états que compte notre continent.
Nous pouvons alors bomber le torse et répondre avec fierté à tous les détracteurs des Lions qui les considéraient comme étant les Poulidor du football africain. Mieux, nous avons réalisé en 365 jours le grand chelem inedit en remportant le CHAN, la CAN-20 et la CAN-2017, après avoir vampirisé la coupe d’Afrique des nations Beach Soccer qui est devenue notre chasse-gardée. Notre pays était sur toutes les lèvres.
Cette réussite a été rendue possible grâce à une union sacrée et surtout un État qui n’a pas lésiné sur les moyens (ou du moins en ce qui concerne l’Equipe nationale A).
Auparavant, la tension née de l’Assemblée générale ordinaire s’est vite dissipée. Mady Touré, le candidat malheureux, est allé remercier le président Augustin Senghor qui lui a demandé de joindre le Mankoo Wutti Ndamli. Le Boss de Génération Football avait préféré poursuivre son chemin et le développement de son centre qui est devenu une référence sur le continent aux côtés de Diambars de Saly, deux véritables pourvoyeurs de joueurs chez les petites catégories voire en sélection A.
Nous avions lors de ces joutes, félicité particulièrement Me Seydou Diagne et son équipe pour avoir fait preuve d’intelligence en sauvant l’élection. Face à l’esprit et à la lettre, suite à une absence de signature sur le casier judiciaire du candidat Mady Touré, il avait prôné l’esprit au lieu de le recaler tout simplement comme son prédécesseur avait fait sur près d’une dizaine de candidats lors de l’Assemblée générale de 2017 pour le même manquement. La souplesse dont Me Diagne avait fait preuve, avait évité au football sénégalais une crise sans précédent.
Les rentiers du football reprennent service
Toutefois, à un plus de 16 mois de l’assemblée générale prévue en août 2025, les rentiers du football ont encore repris du service. Des tractations font bon train depuis quelques semaines.
A notre avis, cette affaire de licence de Ababacar Sarr n’est qu’un prétexte. C’est la guerre de positionnements qui a démarré. D’un côté, il y a le silence de Me Augustin Senghor qui perturbe les jeux. Sera-t-il candidat à sa propre succession ? Aucun texte ne s’y oppose. Et il n’est futil de rappeler que la souverainete appartient à la population du football. Ou bien va-t-il soutenir quelqu’un de son camp pour lui succéder ? Mystère et boule de gomme ! Le cas échéant, ce sera qui ? Le nom de Abdoulaye Saydou Sow, fidèle parmi les fidèles non moins proche collaborateur de Me Senghor est cité çà et là. Même si certains soutiennent qu’il lorgnerait plutôt le fauteuil de premier vice-président de la Fédération sénégalaise de football (FSF) et que la botte secrète serait plutôt Abdoulaye Fall ancien président de la Commission des finances de la FSF. Sans occulter Cheikh Tidiane Seck dont les partisans brandissent une «légitimité historique».
L’autre inconnu et pas des moindres, c’est l’attitude que le nouveau régime va adopter ? Le football, étant l’opium du peuple, un gage même de stabilité, le Président Bassirou Diomaye Faye ne manquerait pas de s’y intéresser.
Pour rappel, à tort ou à raison, Souleymane Ndene Ndiaye, un amoureux du football, a confié récemment que le régime de Me Abdoulaye Wade avait torpillé la candidature de Malick Gakou lors de la première élection du président de la FSF aux suffrages universels directs en 2009. «Il était hors de question qu’on laisse la Fédération de football entre les mains de Malick Gakou qui était alors numéro 2 de l’Alliance pour la République. Nous avions tout pour que Me Senghor passe», a confié l’ancien Premier ministre. Une these balaye d’un revers de la main par les proches de Me Senghor qui soutiennent que leur candidat n’a jamais été contacté.
Redistribution des cartes
Mais, au-delà de la succession du président Senghor, certains Fédéraux prôneraient pour la redistribution des cartes. Autrement dit, ils veulent changer les règles du jeu en pleine compétition. Dans plusieurs forums, le cas des Navetanes est évoqué ; particulièrement le poste de 4ème vice-président qui revient de droit à son président, Amadou Kane. Délit de faciès ? Peut-être ! Sauf, qu’il faut rappeler que ce mouvement populaire ne s’est pas invité dans l’instance suprême du football sénégalais par la force.
Tout est parti de la crise de 2006-2007 avec le CCPC. Jérôme Champagne, mandaté par la Fifa, alors présidé par Joseph Sepp Blatter et Amadou Diakité par la CAF, sous la direction de Issa Hayatou, avaient demandé son introduction. Les réformes des textes ont abouti à la répartition des postes dévolus directement aux présidents de Ligue pro (1er vice-président), de la Ligue amateur (2ème vice-président), du collège des Ligues (3ème vice-président), des Navetanes (4ème vice-président), du représentant des Ligues (5ème vice-président), du président de l’Association des internationaux (6ème vice-président) etc.
Par conséquent, il n’y a qu’une Assemblée générale extraordinaire qui serait habilitée à changer cette donne de plus en plus critiquée. Les textes de l’instance fédérale seraient obsolètes, soutiennent certains. D’autres plaident pour un scrutin par liste; à l’instar de la Fédération française de football. Ce qui est sûr et certain, c’est aucun modèle démocratique n’est parfait. Le plus important, c’est de veiller à ce que toute la famille du football se trouve autour de l’essentiel. Parce qu’aucun d’entre eux, pour ses intérêts personnels ou celui d’un groupe n’a le droit de nous ramener en arrière.
Maderpost / Sud quotidien