La mort par balle d’Idrissa Goudiaby, taximan décédé à Ziguinchor le jour de la marche interdite de Yewwi Askan et Wi, le 17 juin dernier, confirmée par la contre-autopsie assurée par trois experts désignés par l’Ordre des médecins, sur demande de sa famille et après autorisation du procureur de la République près le tribunal de première instance de Ziguinchor démonte l’autopsie initiale et met en évidence un mensonge selon lequel le défunt est mort à cause d’un « objet contondant et tranchant ».
POLITIQUE – Les conclusions des deux autopsies sont assez contradictoires sur les causes de la mort d’Idrissa Goudiaby pour que l’on ne s’interroge pas sur la première et remette tout en question. Ce qui ne saurait manquer. Encore moins la décision de la famille de porter plainte contre l’Etat pour homicide (ou meurtre) et mensonge sur les causes de la mort.
Dans un tel cas de figure, le juge devrait instruire cette triste affaire dont la gravité ne peut passer sous silence et se compter dans le tréfonds des corbeilles, ce d’autant que le rejet de la famille de Goudiaby des conclusions de la première autopsie se conforte de ce qu’il est convenu d’appeler contre-expertise assurée ici par trois experts désignés par l’Ordre des médecins – un professeur de médecine, un légiste, assisté de l’expert choisi par la famille de Idrissa Goudiaby – et autorisée par le procureur de Ziguinchor qui leur a permis d’avoir accès à la dépouille.
La contre-autopsie révélée, d’abord par Ousmane Sonko, leader de la coalition Yewwi Askan Wi, et confirmée ensuite par le quotidien Libération, vient contredire les conclusions du médecin légiste qui a examiné le cadavre de la victime au cours d’un exercice qui obéit à des règles propres à la médecine légale. La cause de la mort devant non seulement être déterminée mais aussi la date, non sans oublier les signes de l’identité que les spécialistes disent complémentaires mais non moins essentiel. Cette compétence scientifique au service de la procédure judiciaire ne doit souffrir d’aucune insuffisance pour la simple raison qu’il s’agit de vie humaine perdue, d’une part, et d’attente de l’issue d’un procès, d’autre part. Inutile de dire que c’est une qualité sans faille qui est attendue de l’expertise du légiste, qui dans cette affaire souffre terriblement tant les deux versions sont loin de partager des similitudes, si ce n’est la mort de Goudiaby par objet.
Aurait-on menti à la famille et aux Sénégalais, et trahi un serment ? Ce sont là des questions légitimes qui en ouvrent d’autres. Pour protéger qui ? Masquer quoi ? Etc. Il reste que les populations ont dépassé l’époque où elles avalaient les couleuvres pour ne pas dire des mensonges d’Etat à la suite de pertes de vies humaines aux cours de manifestations interdites ou non.
Cette contre-expertise aux conclusions cinglantes, marque non seulement un tournant dans les perceptions et exigences des masses populaires qui ne vont plus se faire mener en bateau, si tant et, disons-le encore, elle s’avère.
Il est impossible pour un spécialiste en la matière de se tromper sur une mort causée par arme à feu « avec orifice d’entrée endo-buccal commissural droite et orifice de sortie massétéro-parotidien droit responsable d’un choc hémorragique et du décès » ou par un « objet contondant et tranchant ».
Lié en principe á ces nouvelles conclusions de le seconde autopsie qu’il a autorisée, le procureur informé d’une première expertise aux antipodes, est attendu.
Charles FAYE
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