Une vie, ça prend fin, comme tout.
Un peu plus tôt ou bien plus tard pour les plus chanceux, peu importe.
Du moment qu’on vit chez nous, pourvu qu’on y meurt. Par l’absurde. De préférence. Ca fait maison. Cela donne encore plus matière à débattre. La mort, on connaît bien, c’est une banalité.
N’allons surtout pas prendre des mesures. Cela ne servira à rien du tout. La sélection naturelle, s’autorégulant, on charcutera par-ci, piétinera par-là, électrocutera ailleurs. Faisons confiance à l’ignorance, à l’indiscipline, aux courts circuits clandestins, aux pluies millésimées, aux foncières inondations, aux circonstancielles simagrées.
Nos vies ne valent que dalle ! Juste tombale. Ci-git personne sur une ardoise ! C’est toujours mieux qu’une vie de pénitencier ! Qui va s’en plaindre ?
Piétinés ou électrocutés, qui veut vraiment savoir ? L’autopsie ! On peut bien commencer par elle. Electrocution. Et après !
De la prison introduite par le colon, pour réprimer les comportements autochtones remettant en cause sa domination et la réalisation de ses funestes objectifs, nous, enfants des colonisés, avons fait de l’indigeste rebeussoise, l’hôtel zéro étoile de la déshumanisation.
Cette gifle historique vieille de 90 ans, courant 100 mètres sur cent, en deux blocs, l’un de détention, l’autre administratif, avec ses 40 chambrettes et ses milliers de prisonniers, en dit bien plus long sur nous autres que toutes les études et sciences sociales.
Cet instrument pénal, dans lequel n’importe qui d’entre-nous peut se retrouver, pour une peccadille ou une immonde forfaiture, ne serait-elle pas en définitive le reflet de notre âme ?
Ou encore l’expression vivante d’une croyance galvaudée et rétrograde qui voudrait qu’on ne construise pas une prison afin de n’y finir ses jours ?
Allez savoir pour quelle raison des milliers de prisonniers devraient vivre comme des animaux, alors qu’ils pourraient contribuer à l’essor de développement de notre pays à travers des programmes structurés et socialisant.
A moins que la prison soit chez nous un monde à part, un lieu vide hors du temps, séparé du monde social.
Ce serait alors ne rien comprendre à Didier Fassin et à son prologue sur l’Anthropologie carcérale, selon lequel la vie dans une prison est traversée par la vie du dehors parce qu’elle en est l’inquiétude ombre portée.
Si c’est le cas, je n’aimerai pas me regarder dans une glace ! La prison de Rebeuss serait mon miroir.
Joummah Moubarrack et bon week-end à tous !
Charles FAYE/RFM
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