Décidément le secteur privé sénégalais a un gros problème avec l’administration publique, la dernière manifestation qui fonde la thèse est le communiqué envoyé en guise de réponse de l’appui du Club des investisseurs (CIS) à l’un de ses membres Akilee, par Senelec, société nationale d’électricité certes de type anonyme mais à capitaux publics majoritaires.
ELECTRICITE – Senelec estime dans son communiqué envoyé à la presse “que l’objectivité aurait voulu que le Club des Investisseurs sénégalais (CIS), avant de prendre position pour Akilee”, s’adressa à elle “pour une bonne maîtrise des contours du différend. Ce qui n’a pas été le cas”.
La société dirigée par Pape Mademba Biteye que Maderpost a voulu joindre (appel et sms), sans succès, ne veut pas s’appesantir sur la question du “patriotisme économique” évoqué par le CIS, dans la mesure où elle n’a pour objectif que “d’éluder le véritable problème qui oppose les parties et lequel n’a rien à voir avec une question de patriotisme économique.”
Pour Senelec la préférence nationale suppose au préalable que les parties au contrat respectent la loi et que les intérêts de Senelec et du Sénégalais soient respectés. Mieux, Mademba Biteye et ses services soulignent que le fait que le CIS évoque la loi sur le partenariat public privé pour soutenir Akilee montre qu’il s’est “mépris” dans la mesure où “cette loi ne s’applique aucunement au secteur de l’énergie”.
Ainsi donc continue par presse interposée, avec fortes diffusions de parties d’un contrat pourtant confidentiel, une querelle qui n’a pas certes livré tous ses secrets, mais qui en dit suffisamment long pour que la Justice sénégalaise s’autosaisisse de l’affaire pour le seul bien et intéêrt des Sénégalais et abonnés qui en ont par dessus la tête de ce yoyo.
Pour le peu que sait Maderpost de cette affaire, il ressort que Senelec est dénonciateur du contrat après l’avoir elle-même avalisé, et passé récemment, voire réceptionné, 2000 compteurs intelligents avec règlement de 15% de sa valeur globale conformément aux dispositions, via Akilee dont elle détient 34% des actions depuis 2018, plus précisément février 2019.
Comme quoi, en dépit de tout ce qui se dit, rien n’est suspendu. Mieux, au moment où l’ancien secrétaire permanant de l’énergie, soit l’actuel directeur général, siégeait au conseil d’administration de Senelec à ce titre, fait la leçon au CIS, il se développe par Akilee et pour le compte de Senelec le système Smartsen. Un outil dont le résultat attendu est de réduire considérablement une perte estimée à 17% du chiffre d’affaire globale.
Ce nouveau système qui est un logiciel développé à 100% par Akilee dont Senelec est rappelons-le actionnaire à 34%, permet à la société d’électricité sénégalaise d’avoir une visibilité sur le réseau de distribution à Dakar comme dans les régions et dans les grands événements (Magal, Gamou, etc.). A terme, n’importe quel abonné à Sénégal pourrait vérifier et contrôler la consommation de son électricité domestique (maison) à partir d’une application installée sur son téléphone et donc agir et anticiper les coûts.
Alors diable comment se fait-il qu’un actionnaire à ce niveau de prises de parts qui plus est bénéficie d’une exceptionnalité par un étalement de paiement de l’ordre de 85% de la facture sur une période de 4 ans peut-il revenir sur la durée du contrat, sur l’exclusivité, les fournisseurs, la capacité de gestion de la chaîne logistique, qu’il aura validé après moult séminaires en 2018 ?
De ce que sait Maderpost, Senelec ne veut plus d’un contrat le liant sur 10 ans et pour 2 700 000 compteurs avec une start-up dont elle est actionnaire, sous le prétexte qu’elle ne peut acheter un système informatique qui n’a aucune référence. La société d’électricité ne veut pas se lancer dans une aventure et sans garantie, ce d’autant que d’autres systèmes sont éprouvés dans d’autres pays et par des millions de clients.
Retenons toutefois que les systèmes référencés auxquels fait allusion Senelec étaient jusqu’ici Hexing et Clou, les partenaires historiques qui envoyaient leurs compteurs en gardant pour eux les codes sources.
Dénoncée, Akilee est pourtant ce même partenaire qui a permis des économies d’échelle conséquentes en achetant par exemple à 23 dollars le compteur au lieu de 45 dollars. La start-up est allée plus loin puisqu’elle a exigé aux fournisseurs chinois les codes sources pour une autonomie sénégalaise avant de paramétrer les données.
Mais aussi, surprenant que cela paraisse, l’actionnaire Senelec ne veut pas signer avec une partie d’elle-même, une exclusivité portant sur 2 700 000 millions de compteurs et sur 10 ans. Pourquoi ?
Pourquoi tient-elle à aller vers des appels d’offres longs, prendre plus de temps, payer plus cher ? Il s’y ajoute une exigence commerciale de Senelec qui veut que Akilee lui fournisse gratuitement sa licence dans la mesure où la maison maîtrise le système de comptage et son exploitation, soit l’installation des compteurs, la télégestion, le paramétrage, la relève, télérelève des index, vérification, etc. La partie commerciale réclame le service après vente. A quoi bon existerait alors Akilee ?
Une expérience somme toute tirée d’une expérience similaire pourrait-on croire avec notamment partenariat Senelec et Simelec dans laquelle la société d’électricité détenait aussi 34% des parts, de 2003 à 2013. Ce qui n’a pas empêché d’appeler à l’aide la Banque mondiale, la Banque européenne d’investissement pour une accélération de la modernisation du réseau.
Toujours est-il qu’avec son partenaire dont elle est actionnaire, Senelec fait une économie de plus d’un milliard de francs CFA (1,4 milliard) sur une commande de 350 000 compteurs.
Une prévision que l’on voyait venir depuis 2016 quand la Banque mondiale avait financé l’achat de 260 000 compteurs non sans adjoindre à Senelec de s’attacher les services de spécialistes pour “réduire les pertes techniques et commerciales de la Senelec mais aussi pour améliorer la fiabilité des services d’électricité”. Pour rappel, la Banque mondiale avait allongé 70 millions de dollars soit 40 milliards de francs CFA, sa deuxième et dernière tranche qui bouclait sa participation dans le cadre de la modernisation du réseau.
Modernisation du réseau qu’il faut placer sous la tutelle, à l’époque, du ministère de l’Energie, du Développement et des Energies renouvelables, et estimée à 256,5 millions de dollars sur une période de 9 ans. Le gouvernement devant contribuer à hauteur de 12,5 millions de dollars, la Banque européenne d’investissement (BEI) 94 millions de dollars et la Banque mondiale 155 millions de dollars.
C’est au titre de la modernisation d’ailleurs et sur sur recommandation express de la Banque mondiale qu’un certain Amadou Ly, aujourd’hui président directeur général d’Akilee, avait été envoyé à titre de consultant pour opérer la modernisation souhaitée et pour laquelle le gouvernement du Sénégal avait sollicité un financement.
Trois ans après, en février 2019, pour être précis, Senelec signait avec Akilee avec prise de participation de 34% pour un partenariat de 10 ans, avec à la clé une commande de 2 700 000 compteurs intelligents dont le paiement s’opérait ainsi : une avance de 15% et un différé sur quatre ans pour les 85% restants pour un montant global de 187 milliards CFA soit une enveloppe de 18 milliards par ans. Etant entendu qu’il revient à Akilee d’assurer le préfinancement, le paramétrage etc. des compteurs et d’autres services tels le Smartsen.
Sur ce montant de 187 milliards de francs CFA dont le paiement s’étale finalement sur 14 ans, parties vont aux fournisseurs chinois, aux télécom puisque chaque compteur est équipé d’une puce, aux installateurs électriciens, à Akilee qui en assure la gestion et la gouvernance, mais aussi à l’actionnaire Senelec en terme de dividendes.
Mais, il semble que quelque chose ne tourne plus rond dans ce qui s’apparente à une perte de contrôle de gestion de commande, quand bien même il y aurait eu des voyages en Chine de membres de Senelec et Akilee pour réceptionner les compteurs.
Tout comme il est surprenant que Senelec, société anonyme à participation publique majoritaire concessionnaire de la production du transport, de la distribution et de la vente de l’énergie électrique mais également de l’identification, du financement et de la réalisation de nouveaux ouvrages sur son périmètre, placée sous la tutelle administrative et technique du ministère de l’Energie par l’intermédiaire de la Direction de l’Energie et de la Commission de régulation du secteur de l’électricité (CRSE), aille ouvertement en conflit avec son ministre et de manière si ouverte ! Sans gants !
Peu importe ! Cela n’est pas le problème des Sénégalais qui attendent un service de qualité à son juste prix. Cela dit, au vu de ce qui se lit tous les jours dans la presse et sur les réseaux sociaux, il va de la crédibilité du gouvernement dirigé par le Président de la République, puisqu’il n’y pas plus de Premier ministre, de mettre fin à la récréation en veillant tout de même de tirer cette affaire au clair. Et pour que les choses soient bien faites, c’est dans ce genre de situation que la justice sénégalaise est attendue. Après tout, ce sont quand même des Sénégalais qu’on semble se f…
Charles FAYE
Un commentaire
On parle d’un contrat de 186 milliards en faisant exprès d’occulter quelques points fondamentaux :
D’abord le fait qu’il s’agit d’un contrat cadre sur 10 ans pour déployer, installer et exploiter un système de comptage intelligent qui sera constitué à terme, entre autres, de 2742600 compteurs et qui s’appuie sur des logiciels développés et appartenant à des Sénégalais (question de souveraineté et de sécurité nationales).
Ensuite que le projet est financé par AKILEE à hauteur de 85% et que Senelec bénéficie d’une facilité de remboursement du CAPEX sur 4 ans avec un an de différé, ce qui signifie que le contrat est payé en 14 ans.
Étant dans le secteur de l’énergie et comprenant l’innovation apportée par Akilee dans notre travail, je n’attend rien d’Akilee pour la soutenir.
Allez voir dans leur page Facebook et LinkedIn pour voir le nombre de personnes qui travaillent avec eux à découvert et qui la soutiennent et font des témoignage après chaque publication vous verrez.
Akilee a plus de 800 clients alors pas étonnant que des gens comme moi s’insurgent contre une chasse aux sorcières en tuant une perle sénégalaise rien que pour de la politique.