Un incendie nocturne a consumé la totalité de la récolte d’arachide du jeune producteur Mamadou Papiya Badji. Le feu s’est déclaré dans la nuit du jeudi 23 au vendredi 24 décembre derniers à Kocoumba et a occasionné d’importants dégâts.
FEU DE BROUSSE – À 7 kilomètres de Djiredji Kokoumba, au fond d’un bosquet, se découvre à la lisière d’une vallée escortée d’une végétation dominée par des rôniers géants. D’épais nuages de fumée, une foule de curieux se lamentant devant deux monticules de récoltes d’arachide littéralement réduites en cendre… Voilà le spectacle désolant qui s’offre aux visiteurs au lendemain de cette catastrophe. Visiblement ému, ce jeune entrepreneur agricole qui vient de vivre une nuit blanche reste encore sous le choc. « Je suis né à Badoly, Médina Aïdara. Je me suis installé ici depuis 4 ans pour exercer mes activités agricoles que j’ai héritées de mes grands-parents. En plus de mes frères qui me soutiennent dans les travaux, j’ai fait recours à d’autres jeunes pour renforcer la main d’œuvre », confie la victime.
Après plusieurs tentatives infructueuses, Mamadou Papiya Badji a décidé de sursoir à son projet d’émigration pour retourner à la terre. « J’ai pris trois fois la pirogue pour me rendre en Espagne mais sans réussir », laisse-t-il entendre, non sans préciser que l’agriculture reste son principal moyen de subsistance pour subvenir aux besoins de ses deux épouses et ses enfants. « Je suis préoccupé par le sort de mes six collaborateurs qui sont également des soutiens de famille », regrette Papya, les yeux embués de larmes. Revenant sur ses déboires, il parle d’« une énorme perte » qu’il met sur le compte de la volonté divine. « Dieu merci, j’ai la santé et la vie qui me donnent la force d’exploiter la terre », avance le sinistré qui ne cesse de recevoir des coups de fil des proches qui ont appris la triste nouvelle. Son discours est aussi ponctué de gémissements de groupuscules d’hommes et de femmes plantées devant la récolte mise en meule. Ils sont dépassés par l’ampleur des dommages.
Présent sur le lieu du sinistre, en signe de compassion, Mamadou Lamine Diawara, maire de Djirédji, salue l’engagement et la bravoure de celui qu’il considère comme « le meilleur producteur agricole » du Boudhié. « C’est quelqu’un que je respecte beaucoup. En visitant son champ l’année dernière, j’étais impressionné par ses performances agricoles qui font de lui le champion de ce terroir du Boudhié », reconnaît M. Diawara. Sensible à son sort actuel, il appelle à la solidarité à l’égard d’un homme qui a tout perdu. « Tout ce qu’il a eu comme récolte de la saison est parti en feu. Nous avons trouvé sa famille qui n’avait que ses yeux pour pleurer. C’est pourquoi nous interpellons l’état central sur sa situation. Il mérite vraiment d’être accompagné en termes d’équipements et d’intrants agricoles », plaide le maire.
Incendie criminel ?
Après l’alerte donnée aux environs de minuit, les soldats de la 47e compagnie d’incendie et de secours sont intervenus. Aux termes des heures de manœuvres, ils n’ont pu maîtriser les flammes. 27 hectares de récoltes d’arachide soigneusement rassemblées sont partis en fumés. La gendarmerie qui fait le constat a ouvert une enquête. Des témoignages concordants privilégient la piste d’un incendie criminel. Si, résigné, la victime soutient s’en remettre à Dieu, il voit toutefois la main d’un pyromane derrière cet incendie. « Sans doute, quelqu’un a mis le feu sur les deux tas de récoltes d’arachide avant de s’échapper », confie, convaincu, Mamadou Papiya Badji qui conversait au téléphone. Cette hypothèse est brandie par l’une de ses épouses qui s’interroge sur le mobile réel de ce crime. « C’est une haine qui ne s’explique pas. Pourquoi ils en veulent à mon mari dont le pêché mignon est de choisir de vivre de la sueur de son front », lâche la jeune dame dont la fille s’est évanouie à la vue du spectacle d’horreur. Ces témoignages sont confortés par la propriétaire des lieux, la distance de plus de 500 mètres qui sépare les deux tas d’arachide soigneusement clôturés et l’absence de traces de feu de brousse dans le parage. Mieux, des champs qui entourent ce lieu du sinistre sont épargnés par des flammes qui ont sévit de manière sélective.
Kocoumba, une zone difficile d’accès
Malgré ses énormes potentialités agricoles et pastorales, Kocoumba, situé à quelques encablures de la route principale, reste une zone enclavée. Cette situation explique le retard des soldats de la 43e compagnie d’incendie et de secours qui y ont effectué le déplacement. C’est aussi la voie à l’insécurité. En 2009, le chef du village a reçu la visite d’hommes armés qui l’ont dépouillé de 3 millions de francs Cfa. Madi Kawara qui garde toujours frais les souvenirs de ce coup de force invite les autorités à réaliser la bretelle qui doit les relier à la boucle du Boudhié. « J’en ai parlé à l’entrepreneur qui réfectionnait la boucle, mais ils m’ont réclamé 8 millions », souffle le sexagénaire qui craint pour la sécurité alimentaire de son troupeau de bovins.
Maderpost / emedia