L’interpellation ce dimanche de l’opposant et leader de Pastef Ousmane Sonko par la gendarmerie nationale durant sa « Caravane de la liberté » met un terme à son initiative de rallier Dakar à travers un cortège entamé depuis Ziguinchor, devant passer par plusieurs régions dont Tambacounda, Kaffrine, Kolda, etc.
POLITIQUE – Interpellé ce dimanche par la gendarmerie nationale qui a mis un terme à la « caravane », Ousmane Sonko se retrouve chez lui, isolé, avec un étau qui se referme sur lui.
Le ministre de l’Intérieur, Antoine Diome, a déclaré dans un entretien accordé à la RTS que l’interpellation d’Ousmane Sonko entre dans le cadre des prérogatives de l’État de maintenir l’ordre public et de préserver la sécurité des personnes et des biens.
« Il ne lui a pas été opposé probablement, pour le moment, les chefs d’accusation d’incitation à la violence et troubles à l’ordre public, quand bien même il y aurait eu de la violence, de la casse, mort d’homme et absence de demande d’autorisation pour la caravane qui est considérée comme un cortège et donc soumis à l’obligation de déclaration préalable, mais il est clair qu’il est pris au piège d’un étau qui commence son oeuvre », dit à Maderpost Bassirou Turpin, titulaire d’un diplôme en droit des affaires, consultant juridique et auteur de l’essai « L’islam de France » édité en 2021, en France, par Le lys bleu.
La suite s’annonce claire.
Selon le consultant juridique, l’Etat n’a pas intérêt de procéder à l’arrestation d’Ousmane Sonko, dans la mesure où le prononcé de l’arrêt le condamnant n’aura aucun effet. « Le procès sera repris et pourrait durer encore plus longtemps », dit-il.
Selon M. Turpin, l’article 341 du Code de procédure pénale donne deux cas qu’Ousmane Sonko aurait pu exploiter. Dans le cas d’une arrestation et l’autre étant de se constituer prisonnier. Ce qui, dans l’un comme dans l’autre cas, anéantit d’office le jugement si le délai de prescription n’est pas écoulé.
Ousmane Sonko « devrait alors être rejugé en appel sauf si expressément il signifie accepter le jugement de condamnation dans les dix jours de son arrestation ou de sa constitution comme prisonnier », indique Bassirou Turpin, précisant que l’article 360 du Code de procédure pénale règle le délai de prescription pour faire appel.
Dès le prononcé du jugement, c’est à dire le 1er juin, celui-ci lui sera signifié par tout mode, soit au dernier domicile du condamné ou au siège de son parti, par exemple. Dès lors, un délai de prescription de 15 jours va courir pour interjeter appel contre l’arrêt le condamnant éventuellement. Dans une telle perspective, le pays sera sous tension durant 15 jours.
Durant ce délai, Sonko aura intérêt de se constituer prisonnier notamment vers la fin du délai, sinon, cela fera pleinement les intérêts de l’Etat.
Autrement dit, le leader de Pastef a 15 jours à compter de la signification du jugement.
En cas d’appel, il aurait une trentaine d’avocats ou plus pour faire durer un nouveau procès sur 3 mois au moins, dans la mesure ou chacun de ses avocats aura le droit d’interroger chaque témoin.
Sans compter l’accusée Ndèye Khady Ndiaye qui pourrait avoir plus d’avocats et allonger davantage le procès.
Il faut croire que l’Etat a pris temporairement le dessus sur le mouvement de désobéissance d’Ousmane Sonko, en arrêtant la « caravane de la liberté » , les manifestations et casses.
Le « dépôt du colis » à son domicile confirme la réflexion de Bassirou Turpin. Ousmane Sonko est non seulement isolé, mais cerné. Il ne peut pas sortir de son domicile et il y a de fortes chances que les Forces de l’ordre « lui collent la paix en fonction de la date de signification de l’arrêt.
Reste à savoir, comment Sonko va retourner la situation en sa faveur avant l’expiration du délai de prescription.
Mais l’Etat pourra-t-il prendre son mal en patience jusqu’à l’expiration du délai de prescription.
Sous cet angle, il se comprend pourquoi Sonko n’a pas été arrêté et pourquoi il été déposé à son domicile. Cela dit, le voilà dos au mur. Il suffirait, qu’il y ait des manifestations à la cité Keur Gorgui, pour que l’Etat ait le prétexte et intime aux Forces de l’ordre d’assiéger et boucler tout le quartier sur un large périmètre. Sonko ne pourra plus rien faire sinon attendre l’assaut final.
L’étau se referme ainsi sur le leader de Pastef, ce d’autant qu’aucun membre de son parti ou sympathisant ne peut demander publiquement de sortir dans la rue sous peine d’aller en prison pour appel à insurrection, incitation à la violence ou troubles à l’ordre public.
Les appels à descendre dans la rue ne peuvent désormais être formulés qu’à l’étranger.
La « caravane de la liberté » stoppée, les cadres du parti, voire de la coalition Yewwi Askan Wi devront passer par l’étape de la demande pour la déclaration, l’autorisation et l’encadrement, s’ils veulent la poursuivre sans enfreindre la loi, d’autant plus que les passages à Ziguinchor et Kolda ont enregistré des heurts et un mort.
Déposé chez lui, Ousmane Sonko se retrouve… seul avec sa famille. En attendant …
Maderpost