Dans un communiqué publié sur son site, l’Institut Pasteur pointe “une résistance partielle aux anticorps” du variant Delta, qui rend une seule injection de vaccin Pfizer ou AstraZeneca in- efficace. Un début d’explication à l’explosion des cas.
CORONAVIRUS – Au Sénégal, comme ailleurs, le variant Delta dope, depuis son apparition en Inde, la reprise des contaminations. Considéré comme “préoccupant”, le niveau le plus haut de la classification de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), il est à la fois plus transmissible, plus virulent et même plus résistant au vaccin.
Cette dernière raison a poussé des chercheurs à faire une étude sur l’efficacité des vaccins AstraZeneca et Pfizer chez des sujets ayant pris une seule dose. Les résultats sont tombés le 8 juillet dernier et ils ne sont pas rassurants.
Contre le mutant Delta, une seule injection des vaccins Pfizer et AstraZencca ne suffirait pas. L’étude publiée dès le 8 juillet sur le site de l’Institut Pasteur émane d’une unité mixte de chercheurs français et européens ayant mis sur gril la sensibilité du variant face aux anticorps des primo-vaccinés.
“Le sérum des personnes vaccinées avec une seule dose (Pfizer ou Astrazeneca) est inactif ou très peu actif contre les variants Delta ou Beta”, explique le communiqué. Une analyse britannique réalisée en mai dernier avait déjà montré qu’une seule dose du vaccin de Pfizer ou d’AstraZeneca n’était efficace qu’à 33 % contre le Covid-19 symptomatique causé par Delta. A la même période, une autre étude canadienne s’interrogeait aussi sur l’efficacité des mêmes vaccins sur le variant.
Des recherches partiellement motivées par la tendance de certaines personnes à ne s’arrêter qu’à une seule dose. Dans le dernier rapport de situation du Covid-19 publié chaque semaine sur le site du ministère sénégalais de la Santé, il est notifié un total 744 917 doses administrées, le cumul du programme national de vaccination démarré en février.
Si les débuts ont eu plus de succès, la seconde phase reste très mitigée. Alors que 546 390 personnes se sont fait vacciner en première instance, elles ne sont en revanche que 198 527 à avoir renouvelé l’expérience. L’Astra- Zeneca, mis en cause dans ces études, concerne plus de la moitié des statistiques. Un peu plus de 275 000 concernés n’ont pas encore pris leur seconde dose.
Sont-ils pour autant des sujets à risque ? Le Professeur Coumba Kane, immunologue, rectrice de l’université du Sine Saloum et ancienne de l’Iressef : “La complexité de la maladie chez l’individu est multifactorielle. Cela dépend du virus, de la dose infectante, du terrain de l’hôte, de l’âge de l’hôte, de la santé de l’hôte… Il y a plusieurs facteurs, on ne peut pas généraliser. Il faut de la recherche documentée”. Premier à avoir détecté le variant britannique appelé Alpha au Sénégal, l’Iressef en est encore à la caractérisation des variants.
“Peut-être même qu’on aura besoin d’une troisième dose pour certains vaccins”.
Au Sénégal, le programme se fait avec deux vaccins dont l’AstraZeneca. Mais pour le docteur Kâne, les vaccins se valent généralement. L’essentiel est de toujours fournir une étude pour au besoin réorienter les stratégies.
“Et peut-être même qu’on aura besoin d’une troisième dose pour certains vaccins”, dit-elle, pour étayer la thèse sur les difficiles certitudes concernant le virus à Arn et ses mutations qui peuvent intervenir tous les deux mois et qui, parfois, mettront à rude épreuve l’efficacité vaccinale.
“Si on n’a pas d’études, on ne peut rien dire parce que le comportement du variant dans une zone peut différer d’une autre zone. C’est vraiment quelque chose de nouveau, il faut que la recherche suive pour pouvoir donner des réponses appropriées. Tout ce qu’on peut dire est que ces variants, dont le Delta, peuvent avoir un impact réel sur le taux de transmissibilité qui est beaucoup plus élevé”, dit-elle.
Pour preuve, la semaine 26 (28 juin-4 juillet) a été difficile pour le ministère de la Santé.
Les chiffres des contaminés ont connu une évolution particulièrement spectaculaire. Plus de 1000 nouveaux cas ont été détectés contre la moitié dans la semaine précédente. Soit une évolution des cas positifs de plus de 109 % et un taux d’attaque hebdomadaire tout aussi inquiétant de 6, 2 cas pour 100.000 habitants contre seulement 2, 9 pour la semaine du 25.
Et les choses ne semblent pas s’être améliorées lors de la semaine 27 (5 au 11 juillet). En attendant le prochain rapport de situation sur la riposte qui doit être publié ce matin sur le site du ministère de la Santé, les spécialistes ont déjà alerté sur la possible déferlante troisième vague. Pour la seule journée du vendredi dernier, un record de 476 contaminations a été communiqué, ce qui a porté les statistiques à plus de 1000 cas en 72 heures.
Maderpost / L’Observateur / Aicha Fall