Dans son récent et brillant article intitulé « Le Français, la Francophonie et Nous », le philosophe Khadim Ndiaye (Montréal), aborda le problème que posait à beaucoup de jeunes africains l’utilisation d’une langue étrangère dans leur acquisition tardive de la connaissance (surtout scientifique) en ces termes fort frappants : « Alors que le jeune Africain en zone francophone a forgé généralement ses premières expériences affectives et cognitives au contact de sa mère et de ses proches dans sa langue maternelle, son développement «normal» est brusquement interrompu par l’immersion dans des classes où l’on ne parle que français.
EDUCATION – Là, il doit en maîtriser la syntaxe – parfois au prix d’humiliations (comme l’usage du «symbole» ou du «bonnet d’âne» par exemple, qui ont terrifié des générations entières d’élèves) – avant qu’on ne travaille à lui inculquer les premières bribes de connaissances.
Nul autre n’a mieux exprimé avec pertinence ce retard pour acquérir le savoir de l’enfant africain francophone que le professeur Cheikh Anta Diop : «Le jour même où le jeune africain entre à l’école, il a suffisamment de sens logique pour saisir le brin de réalité contenu dans l’expression : un point qui se déplace engendre une ligne. Cependant, puisqu’on a choisi de lui enseigner cette réalité dans une langue étrangère, il lui faudra attendre un minimum de 4 à 6 ans, au bout desquels il aura appris assez de vocabulaire et de grammaire, reçu en un mot un instrument d’acquisition de la connaissance pour qu’on puisse lui enseigner cette parcelle de vérité».
Ce qui n’est pas le cas de l’enfant français apprenant directement dans sa langue. Lui part du connu (sa langue maternelle) vers l’inconnu (les autres langues et les nouvelles matières qui lui sont enseignées) alors que l’enfant africain patauge, lui, dans l’inconnu ; là où la réalité est recouverte «d’une membrane étanche qui la sépare de l’esprit» et où «la mémoire arrive à se substituer à la raison» (Lire l’article en entier ici http://www.dakaractu.com/Le-francais-la-Francophonie-et…)
En effet, on retrouve dans les préoccupations majeures du Professeur Cheikh Anta Diop, ce souci de transmission précoce des notions scientifiques aux jeunes Africains, leur permettant de s’élever aux plus hauts degrés du savoir et des avancées technologiques qu’ont déjà atteint d’autres peuples.
Préoccupation l’ayant mené à intégrer, dès les années 50, dans son ouvrage maître «Nations Négres et Cultures» une partie consacrée à la linguistique appliquée. À travers la traduction des concepts mathématiques et techniques en langue wolof, selon la subdivision suivante :
1. Traduction de concepts mathématiques (pp.461-467).
2. Traduction de concepts physiques et chimiques (pp.368-380).
3. Traduction du principe de la relativité (pp. 387-391).
4. Traduction de textes littéraires (pp. 392-393).
Cette œuvre pionnière de Cheikh Anta, poursuivie par d’autres vaillants acteurs des langues nationales, en l’absence d’une volonté étatique décisive (qui justifie sa non vulgarisation), inspira récemment Mbaye Faye, professeur de Mathématiques et chercheur au Bloc Scientifique et Technique (BST) à Rufisque, la publication d’un ouvrage.
Un manuel titré «Na ñu Xayma» (Calculons) destiné aux élèves, aux étudiants de première année du 1er cycle des Facultés, aux enseignants, aux moniteurs ou opérateurs en alphabétisation et autres ONG, dans lequel l’auteur aborde les structures fondamentales mathématiques en wolof.
Notamment celles de l’introduction à la logique, les ensembles, les relations, les fonctions et les applications, les lois de compositions, jusqu’à la structure de groupe. (Livre disponible aux Librairies Aux quatre vents et Claire Afrique).
Pour donner au grand public, à travers le réseau social, une idée de la qualité et de l’ampleur des travaux existants dans ce domaine, nous vous proposons ci-dessous une partie de la liste des concepts mathématiques traduits par le Professeur Cheikh Anta Diop, avec, quelques fois, les mises à jour et améliorations ultérieures apportées par d’autres chercheurs sur ses propositions (de même que certaines corrections ou reformulations nous ayant personnellement semblé plus simples ou plus pertinentes).
TRADUCTIONS EN WOLOF DE QUELQUES CONCEPTS MATHÉMATIQUES
Mathématiques : Xayma
Additionner : Yokk – Addition : ag Yokk
Soustraire : Wàññi – Soustraction : ag Wàññi
Multiplier : Baril – Multiplication : ag Baril
Diviser : Séddale – Division : ab Séddale
Total : Mboolante
Nombre : Lim
Géométrie analytique : Kanam jeexu
Nombre réel : Lim amu
Nombre imaginaire : Lim jeneer, Lim janeer
Signe : Joxañ, Joxoñ – Signe plus : Joxoñu dolli – Signe moins : Joxoñu wànni
Zéro : Tus
Neutre : Jambur
Reste : Des
Machine à calculer : Xaymakaay [Machine : Wuutuloxo]
Table (de multiplication) : Xaatim
Tableau : Àlliwa, Àlluwa
Colonnes : Keno
Lignes : Rëdd
Démontrer : Biral – Démonstration : ag Biral
Proposition : Waxeef
Théorème : Céet
Axiome : Appoo
Définir, Définition : Tekki [Définir un axiome = Tekki ab appoo]
Exercice : Tàggantu
Logique : Jaadu – Xellu
Ensemble : Mbooloo
Distributivité : Séddaatleef
Commutativité : Wuutoonteef
Intersection : Dogante [Exemple : Dans la théorie des ensembles, l’intersection de deux ensembles A et B est constitué de tous les éléments appartenant à A et à B = Ci njàngum mbooloo yi, doganteb ñaari mbooloo A ak B mooy mbooleem cër yi A ak B bokk.]
Point : Tomb
Droite : Rëdd
Plan : Maasale
Surface : Yaatu-yaatu, Ëmbka
Axe : Digël
Sens : Joxañ, Joxoñ
Demi-droite : Xaaj
Angle : Koñ, Angal, Puxtel
Angle adjacent : Koñ bokkwet
Angle droit : Koñ jub
Angle aigu : Koñ xat
Angle obtu : Koñ laññ
Angle complémentaire : Motlente , Mëtlente, Matlente
Angle supplémentaire : Yokkalente
Triangle : Ñattikoñ, Ñattkoñ
Triangle isocèle : Ñattkoñ ñaariwet-yam
Triangle rectangle : Ñattkoñ jub
Triangle équilatéral : Ñattkoñ wet-yam
Triangle scalène : Ñattkoñ yamadi
Coté : Wet
Hauteur : Kawewaay
Médiane : Jaar-digg
Sommet : Puj
Hypothénuse : Janookoñjub
Bissectrice : Seddale koñ
Médiatrice : Tasebkawewaay
Droites parallèles : Jub-làng
Angles alternes internes : Jallawlebir
Angles alternes externes : Jallawlebiti
Angles correspondants : bokkdem
Quadrilatère : Ñeentwet
Parallélogramme : Wetlàng
Parallélogramme rectangle : Wetlàng jub
Rectangle : Jubkoñ
Losange : Kaare doy
Carré : Jubkoñyam, Kaare
Trapèze : Ñariwetlàng
Diagonale : Galen, Galan
Cercle : Mbege
Centre : Digg
Corde : Buum
Diamètre : Buumdigg
Arc : Xala
Tangente : Feleesu, Riisu mbege
Rayon (cercle) : Ceññeer
Périmètre, Circonférence : Wëraay, Guddaayu mbege
Volume : Këmb
Symétrie : Safaanoo
Symétrie par rapport à un point : Safaanoo jàkkaarle’b tomb
Symétrie par rapport à une droite : Safaanoo jàkkaarle’w rëdd
Symétrie par rapport à un plan : Safaanoo jàkkaarle’g maasale
Homothétie : Sopiin
Homothétie directe : Sopiin jub
Homothétie indirecte : Sopiin jallarbiku
Coefficient : Ngung
Racine : Reen
Trinôme : Dogñatt
Signe du trinôme : Joxañu dogñatt
Axe : Diggël
Origine : Cosaan
Coordonnée : Xàmmikay
Abscisse : Lal gi
Ordonnée : Aj bi
Projection orthogonale : Takkandeeral jub, Taqandeeral jub
Projection oblique : Takkanderal doy , Taqandeeral doy
Pente : Mbartal
Coefficient angulaire : Ngungul koñ
Aire d’un triangle : Yaatuwaayu ñattikoñ
Courbe : Ndëng
Équation : Yamale [Ex : La courbe et son équation = ndëng ak ug yamaleem]
Conique : Njureelugdank
Ellipse : Mbege tàppandaar
Parabole : Xala, Xon
Hyperbole : Xalajumoyonte
Courbe algébrique : Ndëng aljeebar, Ndëng joxañu (joxoñu)
Courbe transcendante : Ndëng aljeebarul
Coordonnées polaires : Xàmmikaay jotu
Pôle : Dott
Normale : Mag
Sous-normale : Ron mag
Sous-tangente : Ron felasu
Inversion : Jàllarbiku
Pôle d’inversion : Dottub jallarbi
Puissance : Kàttan, Ngôora
Asymptote : Nammlaalul, Nammjotul
Directrice : Wommat gi
Foyer : Taal bi
Excentricité : Moydigg, Tappandaaral
Polaire : Dottu
Division harmonique : Seddale bu deggoo
Axe radical : Diggal reenu
Sphère : Tëmb
Ellipsoïde : Doomi mbege tappandar
Hyperboloïde à une nappe : Xalabumoyonte ben lal , wen dal
Coordonnée sphérique : Xàmmikaay tëmbu
Coordonnée semi-polaire : Xàmmikaay dottugenwall
Déterminant : Deggkat
Faisceau de droites : Takkub rëdd
Point à l’ infini : Tombu gàppoodiku
Droite de l’infini : Rëddu gàppoodiku
Point cyclique : Tombi dem dellusi
Théorie des enveloppes : Faramfacceb ëmb yi
Courbure : Dëngaay, Ndëngiin
Constante : Sax
Intervalle (A,B) : Diggante (A,B)
Hypothése : Wax jiital, Xalaat jiital
Réciproque : Defsafanu
Fonction : Aju, Soppiku
Fonction continue : Soppiku gu dogul
Fonction discontinue : Soppiku gu dog
Fonction primitive : Soppiku gu jëkk
Corollaire : Def wetal
Fonction dérivable : Soppikug selu
Fonction croissante : Soppikug màgg
Fonction décroissante : Soppikug waññiku
Point d’inflexion : Tombub tëdday
Convexité : Xuuge, Norebiir
Concavité : Dóox, Norebiti
Développement limité : Texarñi gàppu
Coefficient de développement : Ngungul texarñi bi
Fonction bornée : Soppikug paku
Dérivée première, seconde, nième : Sel benneel , ñaareel , nàngameel
Cosinus : Tëddiin
Sinus : Taxawiin
Cosinus hyperbolique : Tëddiin xala dumooyu
Sinus hyperbolique : Taxawiin xala dumooyonte
Fonction infinie : Soppikug gàppoodiku
Branche infinie : Banqaas gàppoodiku
Arcsinus : Xala taxawiin
Infiniment petit : Tuuti gàppoodiku
Infiniment grand : Mag gàppoodiku
Forme indéterminée : Bind maanaawoodiku
Limite d’une fonction : Gàppub soppiku
Fonction multiforme : Soppiku bari bind
Fonction implicite : Soppiku binduwale
Calcul vectoriel : Xayma’b demu
Notion de vecteur : Maanam demu
Intensité : Taraay
Direction : Jublu
Sens : Jëm
Vecteurs : Jëmu
Vecteurs liés : Jëmu yu taqoo
Vecteurs glissants : Jëmu yu barastiku
Vecteurs libres : Jëmu yu jambur
Extrémité : Cat
Module : Sebre
Support : Dastandiku
Ligne d’action : Ndefka
Vecteurs équipollents : Demu làng safaano
Relation de Shall : Doteb Shall
Composantes d’un vecteur : Sosandoo
Composantes intérieures, extérieures : Nekandoo biiral , bitil
Pour les traductions des concepts relatifs aux autres matières scientifiques (physique : thermodynamique/tangdooleel, électricité/mbëjj et chimie) nous vous renvoyons aux liens suivants : http://wo.m.wiktionary.org/wiki/X%C3%ABtu_Nj%C3%ABlb%C3%A9en – http://www.grioo.com/forum/viewtopic.php?t=3813.
Nous exposerons, dans la prochaine leçon, les travaux intéressants qui ont été réalisés dans la traduction Wolof des termes informatiques. Travaux qui ont notamment servi de base à la réalisation des versions Wolof de Google, de Mircosoft Windows, Filezilla et d’autres plateformes technologiques modernes.
© Aziz Mbacké Majalis
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