Alassane Ouattara et Tidjane Thiam partagent une vision économique façonnée par Milton Friedman : il n’existe pas de « repas gratuit ».
COTE D’IVOIRE – Pour Ouattara, la prospérité découle de l’intérêt personnel, comme le bon gigot ne provient pas de la générosité du boucher mais de son égoïsme.
Thiam, bien qu’aligné sur cette pensée, s’inquiète davantage de l’endettement de la Côte d’Ivoire. Tous deux sont des adeptes de l’école néo-classique, mais avec une nuance : Thiam prône un État plus réduit pour un État plus efficace.
Pour sa part, Ouattara semble promouvoir l’Etat actionnaire au détriment de ses positions d’antan comme le témoigne la montée en force de la puissance publique dans le secteur bancaire.
Tidjane Thiam, lui, résistera-t-il à cette tentation bien contemporaine de confondre autosuffisance alimentaire et sécurité alimentaire ?
Élu « Financier de l’année » par le classement Financial Afrik en 2023, pourra-t-il réinstaller le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) au pouvoir ?
Difficile à prédire, tant la configuration politique actuelle semble complexe, surtout s’il devait affronter Ouattara ou un dauphin désigné par ce dernier.
Ironiquement, Thiam pourrait lui-même incarner ce dauphin, puisqu’en dépit de leurs divergences partisanes, ils partagent une vision libérale et développementaliste.
Lors de son discours à la nation du 6 août, Alassane Ouattara a soigneusement évité toute allusion à ses ambitions politiques futures. Pourtant, les ténors du RHDP ne cessent de marteler que le président Ouattara reste le « candidat naturel » pour les élections à venir.
Si Tidjane Thiam n’adhère pas totalement à la frénésie de construction d’infrastructures menée par Ouattara depuis 2011, souvent critiquée pour avoir alimenté une dette colossale (estimée à 30 000 milliards de FCFA), il respecte néanmoins le bilan de son aîné, tout en y apportant ses propres critiques.
Une pique récente de Thiam sur le recul de la Côte d’Ivoire de sept places dans l’Indice de développement humain des Nations Unies a visiblement irrité le président et son camp, qui ont qualifié cette accusation de « mauvaise foi ».
La véritable question est désormais de savoir si l’ancien patron du Crédit Suisse a définitivement délaissé son costume de banquier pour celui d’homme politique.
À 62 ans, le premier Ivoirien diplômé de l’École Polytechnique de Paris pourrait devoir troquer le langage policé du monde financier pour celui, plus incisif, de la politique.
Maderpost / Financial Afrik