Les habitants de la métropole du nord des États-Unis redoutent de nouvelles émeutes si le policier Derek Chauvin n’est pas reconnu coupable du meurtre de l’Afro-Américain George Floyd lundi.
ETATS-UNIS – «Nous nous préparons au pire», confie Janay Clanton, une habitante de Minneapolis, où les soldats patrouillent et les commerces sont barricadés lundi, dans l’attente fiévreuse du verdict du procès de l’homicide de George Floyd.
«Tout va exploser», prédit même la sexagénaire, si le policier Derek Chauvin n’est pas reconnu coupable du meurtre de l’Afro-Américain. Janay Clanton n’est pas la seule à se préoccuper: les émotions sont à fleur de peau dans cette métropole du nord des États-Unis, sous haute tension.
Ville typique du Midwest, Minneapolis compte plus de 400 000 habitants. Les gratte-ciel y encerclent le tribunal où le procès de l’agent de police blanc touche à sa fin. Chacune de ces tours de bureaux a décidé de se protéger derrière d’immenses plaques de bois, hautes de plusieurs mètres.
Un magasin de la grande chaîne Target, à quelques centaines de mètres du tribunal, a pourtant décidé de rester ouvert à ses clients, mais rien ne le distingue d’un bâtiment à l’abandon, avec ses protections.
«Je vis en centre-ville, et nous sommes tous assez inquiets du résultat du procès. Vous pouvez vous en rendre compte en marchant dans la ville… nous nous préparons au pire», se lamente Janay Clanton, âgée de 62 ans.
«Les gens seront vraiment en colère»
Tout autour du tribunal, des véhicules blindés de l’armée, derrière des plots en béton et des grilles hautes de trois mètres, témoignent de la nature sensible du procès entré dans sa dernière phase, avec les ultimes argumentaires avant que le jury ne se retire pour délibérer.
Toute autre issue qu’un verdict de culpabilité et la ville, où tombent quelques flocons d’un hiver tardif, pourrait connaître de nouveaux troubles. Si c’est le cas, «je pense qu’il y aura des émeutes et que les gens seront vraiment en colère», assure Pouya Hemmati, un chirurgien de 31 ans.
Il espère que Derek Chauvin sera reconnu coupable pour ce qu’il considère être «un meurtre» et un cas de «brutalité policière» sur George Floyd. «Tout le monde l’a vu mettre son genou sur son cou pendant 9 minutes et demi», souligne-t-il.
«Nourrir le changement»
Signe de la tension qui règne, les forces de l’ordre ont annoncé que, dimanche matin, deux soldats de la Garde nationale avaient été visés par des tirs depuis une voiture qui a pris la fuite. Les deux militaires n’ont pas été touchés par les balles, et n’ont reçu que des blessures superficielles notamment à cause de verre brisé.
Maxine Waters, une élue démocrate noire de Californie qui s’est déplacée exprès dans le Minnesota, est accusée par des responsables républicains d’avoir jeté de l’huile sur le feu ce week-end. «Nous devons rester dans la rue, nous devons être plus actifs, nous devons être plus agressifs», a lancé l’octogénaire en disant espérer la condamnation de l’agent Chauvin.
Pour certains habitants, les annales judiciaires du Minnesota, quand il s’agit d’affaires impliquant des policiers, rendent davantage probable un verdict de non culpabilité.
«Des émeutes et des confrontations»
«La seule fois où on a vu (un policier) être condamné, c’était une personne de couleur. Alors vous savez, en tant que personne de couleur, je ne m’attends pas à ce qu’un résultat aille -entre guillemets- en ma faveur», explique Ashley Commodore.
«Je ne pense pas qu’il sera condamné, et je pense que la ville se prépare à cela», précise cette chanteuse itinérante de 33 ans, citant notamment la présence de la Garde nationale. Elle prédit un volume et une intensité «des émeutes et des confrontations» qui seront «multipliés par deux, voire par trois» par rapport à l’an dernier.
Mais si Derek Chauvin est reconnu coupable, Ashley Commodore espère que l’affaire va «nourrir le changement» dans la manière dont la police opère dans le Minnesota. «J’espère juste que tout va bien se conclure, que tout le monde obtiendra satisfaction, et que notre ville restera debout», s’émeut finalement Janay Clanton.
Maderpost / Afp