En dépit des richesses naturelles et discours des autorités africaines et particulièrement celles de l’Afrique francophone militant pour le développement du secteur privé national, l’économie du continent tarde à se développer et à prendre son envol pour inverser la tendance et doper les exportations non plus de matières premières mais de produits transformés, finis, manufacturés, comme le souhaitent bon nombre de capitaines d’industrie nationaux souvent ignorés pour ne pas dire combattus par l’establishment politique qui a une toute autre perception du leadership économique.
ECONOMIE – Pour quels industriels roulent les gouvernements des pays africains et particulièrement en Afrique francophone ? Cette question ne manque pas de pertinence même s’il est souvent reproché aux opérateurs du secteur privé africain de développer plus une attitude de rentier que d’investisseurs industriels.
Une vidéo reprise par Maderpost, liste les difficultés des hommes et femmes d’affaire d’Afrique francophone principalement. Ils ne sont pas non seulement soutenus, mais encore combattus par les gouvernements forts de leurs signature et de leur cachet servant plus souvent les intérêts des multinationales aux largesses plus trébuchantes, souligne la vidéo.
Vraix ou faux, la réalité décrite en 2019, par la journaliste Emilie Lévêque à Usinenouvelle laisse apparaître que l’Afrique ne contribue “qu’à hauteur de 1,6% à la valeur ajoutée manufacturière mondiale”. “Le défi est de taille: l’Afrique a besoin de 12 millions de nouveaux emplois par an. Quatre leviers peuvent être actionnés.”, ajoutait-elle.
Lévêque soutenait que les pays africains “font dans face à une dialectique complexe : des capacités industrielles limitées et une forte dépendance aux matières première – elles représentent 71% des exportations de marchandises en Afrique – avec un risque de volatilité fort. Cette situation est source de vulnérabilité économique et met sous tension la compétitivité des pays concernés, souligne une étude publiée par PwC. Le défi est de taille : l’Afrique a besoin de 12 à 13 millions de nouveaux emplois par an”.
La plus faible contribution à la valeur ajoutée manufacturière
“Au cours des trois dernières décennies, la valeur ajoutée manufacturière (VAM) a connu un pic de 19% en Afrique du Nord en 2003 et a reculé de 14% à 10% en Afrique subsaharienne. Malgré ses 1,28 milliard d’habitants, l’Afrique a la plus faible contribution à la VAM mondiale, soit environ 1,6% en 2015. Si on enlève l’Afrique du Sud et le Maghreb, la contribution à la VAM mondiale n’est plus que de 1%”, faisait-elle remarquer
Ajoutant : “A l’exception de l’Afrique du Sud et des pays d’Afrique du Nord, la quasi-totalité des Africains vit dans des pays où la VAM est inférieure à 100 dollars par habitant. A titre de comparaison, la VAM par habitant se situe autour de 820 dollars en Chine et 5 220 dollars aux Etats-Unis.”
“En outre, 80% de la VAM africaine est liée soit aux ressources naturelles, soit aux activités professionnelles à faible intensité technologique. Or, c’est lorsque que le secteur industriel s’oriente vers un modèle à plus forte valeur ajoutée technologique que son impact est le plus fort pour l’économie.”
Parallèlement, l’industrialisation doit reposer sur la création d’un environnement économique et social favorable. “Il faut changer la manière dont la politique industrielle est pensée, construite et appliquée, estime Jonathan Le Henry, directeur Stratégie & Afrique francophone chez PwC. Il faut adopter une approche plus pragmatique, moins dogmatique”.
Quatre axes stratégiques de développement industriel
Selon la journaliste, “l’analyse des choix de politiques industrielles en Afrique a permis de dégager quatre stratégies pour stimuler le développement industriel. La première : capitaliser sur les ressources naturelles héritées pour créer de nouvelles activités à plus forte valeur ajoutée.”
“A titre d’illustration, la stratégie d’intégration verticale suivie par le Botswana dans le secteur du diamant a permis la création d’une filière industrielle à forte valeur ajoutée. Afin d’assurer une croissance durable du secteur à l’ère “post-diamant”, les autorités ont encouragé un développement vers l’aval, avec, dans un premier temps, les métiers de la taille et du polissage, et dans un second temps, ceux de la joaillerie et des activités associées à plus forte valeur ajoutée.”
La deuxième stratégie, disait-elle, “est de miser sur des partenariats stratégiques afin de favoriser le partage de valeur et le transfert de technologies. Par exemple, l’alliance stratégique entre Renault et le ministère de l’Industrie marocain. L’objectif était d’installer au Maroc une importante unité de production pour la fabrication de véhicules low-cost destinés a priori au marché méditerranéen. Ainsi, les usines marocaines se développent de façon autonome tout en contribuant au développement du secteur industriel national.”
Troisième stratégie : s’appuyer sur des technologies de la révolution industrielle 4.0 pour dégager des gains de productivité. Le recours aux industries 4.0 est d’autant plus attractif dans le cadre de l’Afrique en raison d’un coût d’acquisition relativement faible compte tenu du poids limité des infrastructures traditionnelles.
“L’exemple de Soko, marque de bijouterie kenyane, illustre l’usage des technologies digitales via la création de modèles économiques innovants. La société exploite les capacités du mobile et du web et a créé une usine virtuelle par la mise en relation de milliers d’artisans indépendants avec des clients dans plus de 35 pays.”
Créer un climat propice aux affaires
“Enfin, il s’agit de créer les conditions nécessaires à l’amélioration du climat des affaires. L’exemple de l’Ethiopie montre que les autorités doivent jouer un rôle de facilitateur à plusieurs niveaux : diffuser une vision claire et ambitieuse, développer une approche transverse et fournir un soutien complet et effectif. La VAM de l’Ethiopie a ainsi progressé de plus de 14% entre 2010 et 2017.
Le potentiel du continent africain n’est pourtant plus à démontrer : sept des dix pays qui connaissent la plus forte croissance au monde sont en Afrique. Cependant, le défi d’un développement industriel durable et inclusif reste à relever. La plupart des pays du continent sont d’ores et déjà engagés dans cette voie, reste maintenant à transformer l’essai.”
Maderpost / Usine nouvelle